Pour commencer, comme cela a été fait lors du congrès national de l’Union syndicale Solidaires réuni à Saint Brieuc la semaine dernière, nous voulons apporter tout notre soutien à Nadia, Abdel et Fanny, camarades de lutte contre la loi Travail victimes d’un chauffard. Le 26 mai 2016, alors que l’intersyndicale des Bouches du Rhône avait appelé à la paralysie de la zone d’activités de Vitrolles, et que ces trois militants de la CGT participaient au blocage d’un rond point, le chauffeur d’un 44 tonnes a forcé le barrage et les a gravement blessés.
En première instance, le chauffeur a obtenu la relaxe, et les familles, soutenues par l’intersyndicale, ont décidé de faire appel. Le procès s’est tenu mercredi 14 juin au tribunal d’Aix. Face à la forte mobilisation devant le tribunal, le juge a préféré reporter le procès à mars 2018. Jusqu’à cette date – et au-delà s’il le faut – nous devons maintenir la pression pour que justice soit faite !
Et en ce début d’été 2017, alors que la séquence électorale vient de se refermer, c’est encore et toujours notre volonté de justice, de justice sociale, qui doit être réaffirmée !
La pseudo-recomposition politique menée par E. Macron n’aura pas fait illusion longtemps sur la réalité de la politique menée par son gouvernement qui dispose désormais d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale. Cette politique, c’est un ultralibéralisme assumé qui va encore un peu plus servir les intérêts des privilégiés, au détriment de la majorité de la population.
Après une simagrée de concertation qui a pu convaincre certains syndicats qui voulaient bien l’être, la réalité s’est vite imposée : le code du travail, résultat d’un siècle de luttes sociales, va être mis en pièces par ordonnances, avec un planning de réunions lors de la période estivale, pour tenter d’éviter tout mouvement de contestation.
Cette liquidation du droit du travail vise à déséquilibrer encore davantage le rapport de force entre salarié-es et patronat, pour la plus grande satisfaction du Medef. Ces nouvelles dispositions vont diminuer les droits des salarié-es, dégrader leur quotidien, tandis que tous les moyens sont donnés au patronat : modification possible des salaires et des conditions de travail, voire du contrat de travail lui-même au niveau de l’entreprise, plafonnement imposé des indemnités prud’homales suite à un licenciement abusif pour savoir combien coûtera un-e salarié-e dont on se débarrasse !
Intégrés à ces projets, de nouvelles remises en cause des institutions représentatives du personnel (à travers leur fusion) visent l’affaiblissement de la présence et du droit syndical existant. Globalement il s’agit d’un approfondissement des lois El Khomri, Rebsamen et Macron, mais ce projet est encore bien davantage : il vise à la fois la suppression de nos droits mais aussi de nos capacités syndicales à les défendre. C’est un véritable projet de société tourné vers la régression sociale, celle-là même qui constitue le lit de l’extrême droite.
Après la liquidation des droits du travail prévue pour le 20 septembre prochain, ce sera la protection sociale d’être dans la ligne de mire. L’agenda du gouvernement va en effet mettre très rapidement le chômage et les retraites à l’ordre du jour.
L’assurance chômage devrait profondément changer : sa gouvernance et son financement sont sur la sellette. Il s’agit d’imposer aux salarié-e-s une insécurité professionnelle permanente. Les CDI devenant l’exception, la grande majorité des salarié-e-s serait soumise à une alternance d’emplois plus ou moins durables et de période de chômage. Pour contraindre les récalcitrants, les conditions d’attribution des allocations chômage devraient être durcies : trois refus d’emplois « décents » entraîneraient la perte des allocations… un moyen d’obliger les chômeurs à accepter des salaires de plus en plus bas et d’exercer une pression à la baisse sur l’ensemble des salaires.
Autre attaque programmée : les retraites, présentée une nouvelle fois comme une « réforme phare », qui s’appuie sur des soi-disant spécialistes et leur discours alarmistes sur les déficits du système par répartition, pour mieux le liquider. Le projet libéral d’E. Macron est simple, il consiste à basculer vers un système par points pour tous les statuts qui va se traduire par une dégradation de la pension et/ou d’un recul toujours plus lointain de l’âge du départ à la retraite. Dans les pays où ce système d’individualisation des pensions a été mis en place, il a ruiné la solidarité intergénérationnelle, crée de l’injustice et creusé les inégalités.
Le défi du syndicalisme dans cette période qui voit l’arrivée d’un nouveau gouvernement est de rapidement réaffirmer la légitimité des luttes sociales face à l’apparente légitimité politique sortie des urnes. Dans ce contexte, les revendications que nous portons, comme les propositions de mobilisation que nous faisons, doivent s’articuler à différents niveaux. Il nous faudra permettre non seulement l’engagement unitaire des équipes militantes, construire des mobilisations massives dans les entreprises, services, administrations mais aussi chez les précaires, chômeurs et dans la jeunesse en particulier.
L’un des premiers enjeux est bien de construire un cadre intersyndical le plus large possible, avec des revendications claires, au plan national mais aussi et surtout au niveau local – niveau déterminant dans la construction des grèves et des blocages. Ce cadre intersyndical de lutte est essentiel, il donne confiance aux militant-e-s, aux salarié-e-s, à tous. Il ne masque pas nos possibles divergences mais affirme la prééminence de notre unité d’action pour des revendications partagées.
Un autre enjeu est aussi de participer à des mobilisations qui fassent le lien entre le dedans et le dehors des entreprises. Nous pensons en effet qu’il est plus que jamais essentiel de travailler à une convergence des luttes articulant syndicalisme, mouvements sociaux et les différentes formes de luttes, citoyennes, écologistes, antiracistes, antifascistes, antisexistes…
Parce que nous n’avons pas vocation à être dans le témoignage, on ne peut pas aujourd’hui faire l’économie d’un débat, entre organisations syndicales et avec les salarié-es, sur le blocage de l’économie et de la production, donc sur la grève générale. Il ne s’agit pas de tomber dans l’incantation, mais d’affirmer que dans la situation actuelle seule la construction d’un rapport de force massif, unitaire, déterminé pourra faire fléchir ce gouvernement et rouvrir la voie du progrès social.
L’impasse libérale et capitaliste qui se dessine ne peut conduire qu’à exacerber la violence sociale subie par les plus précaires, la répression, et également favoriser la progression de l’extrême droite.
Pour Solidaires, il faut partout et à tout moment être au plus près des salarié-es, chômeur-euses, précaires, étudiant-e-s, retraité-e-s et de l’ensemble de la population, pour informer et convaincre de nos alternatives, et pouvoir reprendre la rue.
Il faut revendiquer et obtenir :
- L’abrogation de la loi travail
- Le partage du temps de travail à 32h sans perte de salaires
- La création massive d’emplois pour la transition écologique et la satisfaction des besoins liés à l’environnement
- Une augmentation immédiate et générale de 400 € et un SMIC porté à 1700 €
- Des services publics avec des moyens pour satisfaire les besoins fondamentaux et la conquête des droits sociaux.
Face aux puissants qui ne veulent pas changer ce système qui leur profite, face à la puissance des médias qu’ils détiennent en grande partie, face à la division qui est devenu un outil de management et de régulation sociale, notre tâche est de repartir des droits de chacun-e pour refaire des liens entre tous, entre les luttes et tracer un autre futur clairement anticapitaliste.
Lors du conflit sur la loi travail, des ponts se sont créés entre les luttes, aussi avec ceux et celles qui n’ont pas de syndicats ou s’en défient. D’autres mobilisations (8 mars journée internationale pour les droits des femmes, 19 mars, marche de la dignité, lutte contre l’extrême droite…) ont démontré la pertinence de ces cadres élargis de lutte. Il faut continuer, de la manière la plus unitaire possible, et en ouverture avec ceux et celles qui luttent pour une réelle transformation sociale, écologique, féministe. Notre outil syndical est plus que jamais au service de ces constructions.
Dans l’immédiat l’Union syndicale Solidaires appelle :
- à porter partout les analyses des «contre-réformes » à venir
- à construire et participer aux initiatives intersyndicales
- à soutenir les luttes engagées dans les différents secteurs et travailler à leur convergence,
- à engager sans attendre la bataille pour le code du travail :
- en participant aux nombreuses manifestations à l’appel des intersyndicales et des collectifs locaux du front social
- en préparant les conditions d’un mouvement d’ampleur prenant appui sur une multiplicité d’initiatives tout au long de l’été pour harceler le gouvernement. Dans ce cadre nous appelons à manifester massivement le 30 août à Jouy-en-Josas pour bloquer l’université d’été du MEDEF
- en proposant de nouvelles initiatives dans le cadre le plus unitaire possible, au tout début du mois de septembre, pour un mouvement social appuyé sur une grève interprofessionnelle et intersyndicale
Face à l’urgence sociale, nous n’avons plus le choix, il faut construire une mobilisation large et unitaire dans les entreprises, les administrations et dans la rue, avec toutes et tous, et notamment avec celles et ceux pour qui les élections politiques n’ont plus ou pas beaucoup de sens.
Nous, syndicalistes, avons cette responsabilité ! La responsabilité de redonner l’espoir d’une transformation sociale, de l’égalité et de la justice ! Alors battons-nous, ensemble, pour gagner !!!